par Carly Dollin

Au cours de cette soirée de gala[1] de ce 31 août à New York, cette brave femme en a profité pour brandir un NON à l’indécence et à l’imposture ! Pancarte visible, lisible, perceptible, agitée avec véhémence, sillonnant toute la salle, « Kote Kob Petrocaribe a ? », cette dame solide, élégamment vêtue, a marqué à l’encre forte, cette soirée de célébration en l’honneur de quelques musiciens Haïtiens. Cette Haïtienne-Newyorkaise s’est faite porte-parole des millions d’âmes du terroir et de la diaspora, putréfiées et victimes de la cupidité d’un régime politique corrompu jusqu’aux os.

A la question, « Martelly, aurait-t-il mérité une plaque d’honneur
pour son apport à la musique Compas ? » ; beaucoup d’Haïtiens
auraient répondu, avec raison, que la décision est juste. Evidemment, Sweet-Micky
ne se réduit pas qu’à la série 100%, 200%, …, 800%, interdite aux enfants et
aux oreilles chastes. Le répertoire de Sweet-Micky, notamment à ses débuts, est
garni de quelques productions musicales salutaires et succulentes.

Cependant, ce qu’il convient de garder à l’esprit, c’est que l’être humain est un tout indivisible. Les officiels haïtiens, gagnants du loto électoral, doivent cesser de jouer le jeu vilain de la double personnalité. En effet, même si vous seriez le meilleur joueur de football au monde ; si vous êtes un délinquant fiscal, si vous fraudez, volez, dilapidez, vous répondrez aux questions de la justice ; et, comme tout citoyen, faute par vous de ne pouvoir vous innocenter, vous risquez de finir en taule. Vous pouvez être un artiste adulé, encensé et affectionné par le public ; mais si vous ne vous soumettez pas aux principes de la Cité, la prison sera votre demeure.

De cette règle de bonne gouvernance et de la primauté de la loi, le célèbre chanteur, R. Kelly, accusé de pédophilie et de multiples agressions sexuelles, n’a pas été épargné. Dans la même veine ; aujourd’hui, ils sont légions, les présidents à être honorés pendant des années, puis épinglés dans des pratiques de corruption et d’enrichissements illicites, et qui finissent par croupir dans l’humiliation de la prison. Park Geun-Hye, de la Corée du Sud, Luiz Inacio Lula da Silva , du Brésil, Alberto Fujimori, du Pérou, Álvaro Colom, du Guatemala, sont des exemples notoires de présidents devant purger leurs peines en prison, pour des fraudes, des malversations et des actes de corruption.

Haïti ou tout autre pays de la région, évidemment, ne devraient pas être des exceptions à cette règle d’or. S’il s’avère que des présidents, des sénateurs, des députés, des ministres ou des directeurs généraux Haïtiens seraient impliqués dans des gabegies similaires, que la justice tranche et sévisse avec équité et impartialité.

A l’instar du journaliste Irakien, révolté et énervé face aux mensonges et
aux décisions criminelles de l’ancien président Américain, Georges Bush, jusqu’à
lui envoyer des chaussures[2]
au visage en 2008, le cri anti-corruption strident poussé par cette femme
courageuse témoigne le même sentiment de dégout envers des dirigeants indécents.
Au cours de cette récente décennie, de nombreux diplomates et représentants
officiels ont été l’objet de ces pratiques de revendications choquantes par des
citoyens frustrés qui les ont bombardés de « Milkshaking », en guise
de stratégies pour salir leurs costumes, de lait et les humilier.

Tantôt il est Ti-Simone et porte la veste de l’artiste pour exposer toutes
les bêtises, les injures et les invectives pour déblatérer sur des
professionnels et des citoyens honnêtes ; tantôt il décroche ses habits
d’homme d’Etat, pour tenter de ressusciter une certaine image et
« joffrer » des cartes d’aspiration à une éventuelle récidive dans le
jeu électoral malsain sur cet espace de 27 750 km carrés truffé de tous les
animaux politiques. Comme si l’Haïtien majeur n’aurait rien appris de ses
erreurs, en exprimant de la maturité électorale pour déduire que l’indécence,
l’indignité et la cupidité ne peuvent jamais assurer le bien-être collectif.

Le PetroCaribe,
véritable talon d’Achille de ce régime en putréfaction

Le refrain « Kote Kob Petrocarbe a ? » anime les rendez-vous de rara, de carnaval, les vidéoclips ; il  traverse toutes les frontières. Il est sur les lèvres des jeunes, des Madan Sara des enfants, des hommes, des femmes d’ici et d’ailleurs. Tantôt, les petrochallengers arrivent à se regrouper autour d’une table, sur les réseaux sociaux et dans la rue pour attiser le feu derrière les bourreaux impitoyables qui ont dilapidé les fonds de cette coopération bolivarienne. Etant donné l’absence de leadership et d’harmonie au sein de l’opposition politique mal fagotée du pays, les revendications des petrochallengers n’ont pas encore atteint les résultats escomptés.

Pourtant, de l’huile et de l’eau fluide ont été mises au moulin de l’opposition pour renverser la tendance indécente, criminelle et macabre qui règnent dans les institutions les plus prestigieuses du pays. Les multiples frappes du petrochallenge ont mis cette administration à genoux, voire K.O. Les révoltes des 6-7 juillet, un petrochallenge avant la lettre, ont été à la base d’un ensemble de décisions présidentielles douloureuses pour mettre à l’écart des têtes influentes de ce régime qui ont été décapitées en guise de prix à payer pour permettre à la présidence d’avoir quelques bouffées d’oxygène supplémentaires.

S’ensuivaient d’autres dates mémorables dans les annales du mouvement petrochallenge qui ont abouti à de nouvelles conceptions et de nouveaux discours du locataire de la Maison Blanche Haïtienne maculée, par rapport au dossier du PetroCaribe. Le 17 octobre puis le 18 novembre, la fureur populaire montait d’un cran. La présidence a été obligée d’intégrer dans son agenda, malgré elle, avec plus de sérieux, le sujet générateur des insomnies, des anxiétés, des crises et des phobies officielles, « El PetroCaribe ».

En guise de preuves et de réponses fermes pour témoigner à la population
qu’il obéit au fameux adage « Vox Populi, Vox Dei », le président a
limogé son Premier ministre hypocrite du serment sacré d’Hippocrate, qui était sauté
comme un fusible pour absorber les chocs reçus à la tête, au cœur et au poumon
de la présidence. D’autres têtes officielles allaient être exclues et déposées
dans les vestiaires, pour tenter de calmer la population dans ses justes revendications.
D’une sortie à l’autre, les tensions étaient plus vives ; des centaines de
milliers de citoyens avaient bloqué toutes les artères de la Capitale, incendié
des dizaines de voitures, des magasins, des stations d’essence et menacé de
réduire en cendre des hôtels suspects d’avoir bénéficié de l’argent sale dans
le désordre du Petrocaribe.

Les dernières mobilisations « pays lock » débutant le 7 février,
qu’on croyait être le coup de grâce, ont été déterminantes ; mais déviées
par des stratégies déloyales dominantes du régime qui a usé de moyens
démoniaques pour refroidir les manifestants frustrés, oubliés, putréfiés et meurtris,
dans leur fougue de demande de réparation et de justice face à ce forfait
financier qui hypothèque leur aujourd’hui et le demain de leurs enfants.
Mercenaires, bandits armés, massacres spectaculaires, tous les moyens étaient
bons pour sauver le soldat Jomo qui avait perdu toute sa lucidité et toute ses
forces. Selon un rapport de la Justice, en plus des pertes économiques et
sociales gigantesques, 57 âmes exterminées par balles, devaient payer le prix
du maintien au pouvoir, en février dernier, de ce président et ses amis
indignes, indexés de malversation et de corruption graves dans les fonds
PetroCaribe.

Le PetroCaribe, un crime
financier spectaculaire !

Pour cerner avec une triste lumière éclatante, l’acuité du forfait causé
sur l’accord économique bilatéral Haïti-Venezuela, paraphé en mai 2006 par le
président René Préval et  le vice-président du Venezuela, José Vicente
Rangel, le lecteur est convié à survoler le rapport de la Cour des Comptes.
Tenez-vous bien ! La lecture de ce travail intègre et professionnel de la
Cour est interdite aux cardiaques, aux hypersensibles et hyperémotifs qui
déduiraient que des centaines de lycées, des dizaines de campus universitaires
et écoles professionnelles auraient pu être construits ; des stades au
standard international, des parcs sportifs, des logements sociaux décents, des
salles de théâtre, de cinéma, des hôpitaux, des centres de santé, des
infrastructures de qualité, électricité, transports, routes, etc. auraient pu
être érigés avec ces fonds, totalisant plus de quatre (4) milliards de dollars.

A contrario, un vaste désordre a été opéré sur ce prêt accordé à Haïti. Des
mensonges multicolores, des camouflages, des malversations, corruptions et
dilapidations sans pareilles, ayant conduit à des petits copains devenus
multimillionnaires dans un laps de temps, tel est l’échec cuisant qu’on a
enregistré de la gestion de ces fonds destinés au développement du pays.

Le viaduc de Delmas-Nazon, qualifié à juste titre par la population de
Carwash, a été surfacturé à 23.3 millions[3] de dollars ; 67.5 millions de dollars ont été évaporés dans le programme
bidon EDE-PEP, jugé par la Cour des Comptes d’un vaste gaspillage des fonds
publics. Quarante-trois (43) millions de dollars destinés, entre autres, à des
projets d’hébergement et d’habitat, ont été alloués à l’UCLBP, pour de maigres
résultats. Une gestion frauduleuse et calamiteuse de l’enfant prodigue issu du
sang présidentiel indécent, encadré par un premier ministre mauvais
gestionnaire et amateur, a été faite des 27.8 millions de dollars affectés au
projet de réhabilitation des infrastructures sportives. Le cumul de ces
montants dilapidés se solde en une somme gigantesque extraite du trésor public,
en dehors des principes basiques de l’efficience, de l’efficacité et de la
transparence dans l’exécution des projets publics. Des centaines de projets ont
été approuvés par la primature, en violation des principes de passation de
marché.

Cette courageuse femme, qui s’était exposée face à ces bandits recherchés
activement par la justice pour des crimes graves, leur empêchant de continuer confortablement
dans leur imposture, a été un acte d’une citoyenne digne dont le peuple Haïtien
est fier.

Des bandits sont dans les salons, dans la rue, dans les institutions ;
ils mangent et boivent dans les mêmes assiettes et les mêmes verres que
l’ancien et l’actuel présidents de ce régime politique sans vergogne. Temps
d’arrêter ces bluffs, ces majigridis et ces graffitis indignes d’une nation
historique !

Carly Dollin
carlydollin@gmail.com


[1] https://lenouvelliste.com/article/206391/haitian-labor-day-fest-un-gala-en-lhonneur-des-legendes

[2] https://www.youtube.com/watch?v=I-4EyRelUr8

[3] https://haitieconomie.com/wp-content/uploads/2019/06/Haiti-Deuxieme-Rapport-de-la-Cour-Superieure-des-Comptes-sur-la-Gestion-des-Fonds-Petrocaribe-corrig%C3%A9.pdf