Parmi les visages qui incarnent l’espoir dans les recoins les plus oubliés de la République Dominicaine, celui de Madre Bethie rayonne d’une force silencieuse. Religieuse humaniste, fondatrice et Supérieure Générale de la Congrégation Samaritana, elle est devenue un pilier pour des milliers d’Haïtiens vivant dans les Bateys — ces villages précaires regroupant les travailleurs de la canne à sucre, souvent laissés en marge de la société.
Une mission née du chaos
Contrainte de quitter Haïti en raison de l’insécurité grandissante et de la violence des gangs, Madre Bethie a trouvé refuge en République Dominicaine avec plusieurs sœurs de sa congrégation. Loin de se replier sur elle-même, elle a transformé cet exil en mission.
En 2016, elle lance le programme « Yon Ayisyen, Yon Batistè » (Un Haïtien, Un Acte de Naissance). Ce projet ambitieux a permis à près de 10 000 Haïtiens vivant dans les Bateys d’obtenir gratuitement des actes de naissance, des extraits d’archives et des passeports.
« Nou tout se imigré, se lye kote nou fèt la ki chanje. »
Nous sommes tous des migrants, seul l’endroit de notre naissance change.
— Madre Bethie
Dignité retrouvée
Pour des milliers de familles haïtiennes nées en République Dominicaine sans existence légale, les documents d’identité représentent bien plus qu’un bout de papier : ils ouvrent les portes de l’éducation, de l’emploi et de la dignité.
Jeanne, 34 ans, mère de trois enfants, raconte :
« J’ai passé 10 ans à essayer d’avoir un extrait pour mes enfants. Chaque fois, on me demandait 4 000 pesos. Grâce à Madre Bethie, mes enfants ont maintenant leurs papiers, et moi, je peux enfin respirer. »
Marc, coupeur de canne de 48 ans, témoigne :
« On vit comme des fantômes dans les Bateys. Mais quand j’ai reçu mon passeport, j’ai senti que j’étais redevenu un homme. »
Nourrir les corps, nourrir les âmes
Entre 2021 et 2023, la Congrégation Samaritana a lancé le programme « FeedingProgram’s », une initiative de distribution alimentaire dans les Bateys. Grâce au soutien de partenaires et d’ambassadeurs, environ 500 000 repas ont été distribués.
Mickaella, 12 ans, confie :
« Avant, je mangeais une fois par jour. Maintenant, quand les sœurs viennent, on a du riz, des haricots, du lait… c’est comme Noël. »
« Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire. »
— Matthieu 25:35
Une voix qui interpelle les institutions
Face à la lenteur administrative et à la corruption, Madre Bethie dénonce le trafic illégal d’actes de naissance, souvent vendus entre 3 000 et 5 000 pesos. Elle interpelle directement les consulats haïtiens en République Dominicaine :
« Ils doivent être le reflet d’un Haïti digne, pas d’un Haïti complice de la souffrance silencieuse de ses enfants. »
Conclusion : une foi en action
La Congrégation Samaritana n’est pas qu’un refuge spirituel : elle est un moteur de transformation sociale. En alliant Évangile et engagement humanitaire, Madre Bethie incarne une foi vivante, enracinée dans les actes concrets.
Tandis que les projecteurs médiatiques ignorent ces travailleurs invisibles, elle leur tend la main, leur rend un nom, un repas, une espérance.
« Bondye pa janm bliye pèp li. »
Dieu n’oublie jamais son peuple.
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