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par Dieff DERICE

Mardi 21 novembre 2017 ((rezonodwes.com))– « J’ai simplement fait ce que j’avais envie de faire », stipule Hannah Arendt lors d’un entretien avec Günter Gauss en 1964, après avoir suivi le procès d’Eichmann. Que ce soit dans sa façon d’être femme, d’être philosophe, d’être juive, ou d’être allemande, elle est toujours libre et ne se détermine jamais par rapport à ce que l’on attend d’elle. Elle ne se soucie pas de l’opinion et c’est cela qui la rend potentiellement l’une des plus grandes théoriciennes de la modernité politique.

Je fais cette analogie à Arendt, c’est pour vous dire que lorsque j’écris, je n’écris pas pour faire plaisir à quelques personnes ou quelques groupes, mais j’écris pour faire plaisir à une communauté qui a soif d’une parole nouvelle et qui en a marre des répétitions bouillonnesques qui se font à la radio à longueur de journée.

De surcroît, mon souci premier, c’est de m’éloigner autant que possible à ce pakavilisme pessimiste qui ronge la nation haïtienne. Car le premier rôle d’un intellectuel ce n’est pas parler à la radio, mais c’est de préférence écrire pour la postérité. Ce qui manque aux élites intellectuelles en Haïti, l’une des causes ineffaçables de notre sous-développement, ajouté à la corruption qui gangrène la société.

En effet, s’il est vrai qu’aucune société ne soit à l’abri de la corruption, mais il y en a certaines qui font de la corruption le socle décisionnel par excellence, ce que nous sommes en train de vivre en Haïti. Depuis la naissance de l’Etat haïtien, cette épidémie ronge toutes les sphères d’activité de la société : l’administration publique, la justice, l’exécutif, le parlement, l’université, les organisations de la société civile etc…

Tous les hauts dirigeants de ce pays ont, d’une façon d’une autre, le doigt trempé à la corruption. Pourtant, personne n’est jamais emprisonné, a l’exception du procès de consolidation qui a vu 4 hauts fonctionnaires de l’Etat incarcérés, mais par la suite, trois d’entre eux allaient devenir président de la République. Hélas!

Haïti est le seul pays où on est incapable de juger les corrompus. Mais, on doit se poser une question : qui doit juger les corrompus? Pour les hauts fonctionnaires de l’Etat en activité, ils ne sont passibles que devant la haute cour de justice, or la haute cour de justice est constituée par le sénat de la république après la mise en accusation par la chambre des députés. Les parlementaires, ne sont-ils pas des corrompus?

Maintenant, prenons ceux et celles qui sont passibles devant les tribunaux de droit commun. Nous avons affaire à un pouvoir judiciaire traité en parent pauvre, le dernier budget alloué à la justice dans la dernière loi de finances le prouve, des juges qui, après un procès doivent prendre le même taxi avec les membres de famille de l’accusé ou de l’accusé lui-même, des juges qui rentrent toujours en grève sous le fallacieux prétexte d’exiger des meilleures conditions de travail, pourtant la raison évidente reste l’augmentation de leur salaire; l’on se demande est ce que ces juges peuvent faire de la justice cette femme aux yeux bandés.

Dans ce même pouvoir judiciaire traité en parent pauvre, on retrouve certains autres juges qui habitent dans des villas, possèdent des voitures de luxe, des juges où leurs enfants étudient dans les meilleures écoles et universités en Haïti ou à l’étranger, l’on se demande est ce que le salaire de ces juges pourrait répondre a leur train de vie. Je soulève des interrogations, mais je n’ai pas les réponses. Cependant, je peux constater que nous avons affaire à un système judiciaire qui tombe en décrépitude, car toute la chaîne pénale est contaminée par ce virus qu’est la corruption, en passant par les greffiers, les avocats pour arriver aux juges pour ne citer que ceux-là. Face à une telle situation, l’on se demande à qui faire confiance et que faire?

La seule et unique chose à faire, c’est entamer, une fois pour toute, une vraie lutte contre la corruption. Pour en arriver, il faut allouer une part importante du budget de la république à la justice, car l’actuel budget en application montre que le pouvoir en place ne fait pas de la justice une priorité, il faut laisser le soin au pouvoir judiciaire de nommer les juges, car la situation actuelle, ou les juges sont nommés par le président, fait que la justice reste le vassal de l’exécutif, et en enfin, il faut instituer la peine de mort. Car tous ceux et toutes celles qui dilapident les fonds publics à leur propre intérêt doivent être pendus sur la place publique au vue de tout le monde. Ainsi on pourra espérer avoir une société ou la corruption sera reléguée au second plan, mais pour l’instant, on ne peut faire confiance à personne.

Dieff DERICE, Politologue

Membre de la SHSP